J’aime bien l’Histoire et j’aime bien les histoires.

Quand on plonge dans l’univers du yoga, il est difficile de ne pas à un moment ou un autre s’intéresser à l’hindouisme car yoga et hindouisme sont si proches …

Au hasard des lectures sur le yoga, je suis tombé sur la notion de l’oeuf d’or, Hiranyagarbha, Prajapati, Manu …. Aïe ! qu’est-ce que c’est ? 

J’ai cherché et je n’ai rien trouvé dans mes livres classiques de yoga. Il est apparu rapidement que ces mythes, enseignés en partie lors des formations en hatha yoga, relèvent plus de la connaissance de l’Inde, de son histoire et de sa religion, l’hindouisme (pour être très précise, l’hindouisme n’est pas la seule religion en Inde mais il s’agit de la religion dominante).

Alors je n’ai rien inventé, j’ai cherché dans ce que je préfère : les livres

Deux noms sont rapidement apparus : Michel Angot, auteur de « Les mythes des Indes » (cf son site http://www.michelangot.com/ ) et Alexandre Astier auteur de « L’hindouisme » sa bibliographie ici).

Et là, c’est génial, on se régale ! Je vous recommande la lecture des ouvrages d’Alexandre Astier : ils sont très didactiques, abordables et simples. On a l’impression très vite de tout comprendre.

Alors ? Après avoir écrit un peu sur le Samkhya (lire notamment Pour comprendre la philosophie du Samkhya : une explication du monde …), plein d’images me sont revenues.

L’origine du monde, pourquoi sommes nous là ? Peut être aussi est ce lié inconsciemment à cette énorme crise que nous traversons : le coronavirus, mais aussi les bouleversements climatiques, la 6ème extinction animale …

Toujours est-il que …voilà !

Nous le savons, l’Univers et notre Terre sont nés du big bang. Ou plutôt notre Terre est né du Big Bang. Pour l’univers, on ne sait pas trop … Les astrophysiciens font des découvertes fascinantes et de plus en plus rapidement. Mais toujours est-il que notre monde n’est pas arrivé là tout seul. Scientifiquement on trouve des facteurs d’explications. La question sera de pouvoir remonter au fait originel qui a fait que …

Par contre, si je m’en réfère aux grandes religions, le monde a été créé par une immanence de l’ordre du divin.

Pour l’hindouisme, c’est la même chose. Ce qu’il faut d’ores et déjà retenir c’est qu’ il n’y a pas un tout début, c’est à dire de rien naît quelque chose. Il n’y a pas de création ex-nihilo. Et il n’y a pas de fin.

Le monde se dilue (le pralaya), se modifie. Le monde est émit.  Il naît.

 

Et notre tendance d’être humain est dès qu’il y a naissance de dater, de donner un âge.

Apparaît donc la notion d’âge du monde : les kalpa, ères cosmiques en Inde. Chaque kalpa est considérée comme un jour de la vie de Brahman. Chacune d’entre elles est constituée de 1000 mahayuga, chacun d’eux étant divisés en 4 âges, les yuga (et 1 yuga c’est approximativement 4 000 000 d’années ) : un âge d’or (le krita yuga), un âge de la triade (treta yuga), un âge caractérisé par le deux (dvapara yuga) et un âge sombre (le kali yuga).

J’évoque cette subdivision car vous verrez souvent au travers de vos lectures que nous sommes dans le kali yuga, une période de destruction et que l’homme court à sa disparition … ce qui laisse rêveur car cela suppose que l’homme a TOUJOURS vécu dans le kali yuga ! Mais peut être sommes nous destinés effectivement à disparaitre (dans plus ou moins longtemps) et qu’à l’échelle cosmique, il y a eu et il y aura autre chose que l’humanité. Cela nous repositionne dans ce grand tout qu’est l’Univers. Pour autant ce n’est pas une raison pour précipiter le destin de l’humanité !

Pour la création du monde dans l’histoire philosophique de l’Inde, il faut remonter au Rg Veda. Cette succession d’émanation / destruction du monde explique l’importance des rites. Ceux-ci existent car ils fortifient  et préservent contre la destruction du monde. Le rite agit en tant qu’acte conservatoire. La religion est un rempart.

 

Selon le Taittirya Brahmana, au commencement il y eut une grande chaleur d’où naquit le feu, puis la lumière. Cela fendit la vessie et les eaux se déversèrent d’où émergent 10 oblateurs (les Prajâpati). Les Prajapati deviennent Prajapati (tout court).  Il pleura. Ses larmes formèrent la terre. Ce qu’il toucha à son niveau devint l’espace intermédiaire, ce qu’il toucha en haut devint le firmament.

 
an attempt to depict the creative activities of prajapati
Tentative de description des activités de Prajapati

Selon le Satapatha Bhrahmana, c’est Prajapati (« le maitre de la descendance ou de l’engendrement ») qui va engendrer le monde. Au début, il n’y avait que les eaux. Elles voulurent engendrer et avec ardeur, tapas, elles créèrent un œuf d’or, Hiranyagarbha. Ou plutôt comme dit le texte, un œuf d’or se manifesta. D’autres fois, Purusa pré-existe et c’est lui qui désire procréer. De lui, l’homme se manifesta : Prajapati. Celui-ci voulut parler. Il émit Bhur, et la terre apparut (n’oublions pas qu’il n’y avait que les eaux, l’œuf et Parjapati), Bhuvah  et l’espace intermédiaire fut et Svar, le ciel fut. Prajapati fit avec 5 syllabes les 5 saisons (ne me demandez pas lesquelles !). Quand le souffle atteignit le ciel, il émit les dieux et la lumière du jour naquit; quand le souffle atteignit la terre, il émit les asuras et les ténèbres apparurent.

 

Et Manu ?

Manu a été interrogé sur la création du monde qu’il rapporte à sa manière dans le Manava Dharma Sastra. Au début, il n’y avait que ténèbres. Elles furent écartées par le bienheureux qui s’y déploya. De son corps, il émit les eaux et y déversa sa semence qui devint l’œuf d’or. Brahma, l’aïeul de tous les mondes en naquit ! Brahma ou Narayana fendit la coquille en deux pour former le ciel et la terre et le firmament au milieu ainsi que les 8 orients et le réceptacle des eaux. De son soi, il sécréta l’organe mental réel et non réel, ahamkara (le je), le Grand Soi, et les organes des sens. Il façonna avec tous les êtres en des portions subtiles. Il fit sortir de sa bouche les castes : les brahmanes, les guerriers (les ksatrya), les vaisya et les sudra. Le Seigneur devint mi-homme, mi-femme. Il créa les rishis : Marici (mirage, rayon), Atri (dévoreur), Angiras, Pulastya (horripilé), Pulaha (tondu), Krtu, Pracetas (l’intelligent), Vasistha (plus riche), Bhrgu (Fulgurant) et Narada. Il créa les 7 Manus, les Yaksas, les Raksasas, les Picasas, les Gandharvas, les Apsaras, les Asuras, les Nagas, les Sarpas et les Suparnas, les éclairs, tonnerres, arcs en ciel, les homme et les animaux.

 

Au fil des Upanishad, Prajapati, Purusa, Hiranyagarbha vont se confondre. Et il est presque possible de démultiplier à l’envie les mythes de la création.

Le Samkhya reprendra et développera des éléments rapportés ci-dessus. Le Purusha devient la Conscience absolue et les eaux primordiales, Prakrti. Prakrti emprisonne Purusha. La libération de Purusha doit être en conséquence son isolement (kayvalyam) de Prakrti et de ses formes.

Vous avez aussi beaucoup entendu parler de la TRIMURTI, les trois dieux : Brahma, Vishnou et Shiva. Le créateur, celui qui maintient l’ordre et le destructeur (je reviendrai dans un prochain article sur la trimurti car par exemple Shiva n’est pas que le destructeur, mais pour aujourd’hui, restons en là). Vishnou repose sur le serpent Shesha, dont le nom signifie « Reste ». Il est appelé aussi Ananta, « Sans fin ». Ce serpent symbolise la réserve d’être qui demeure une fois que les mondes avec leurs habitants ont été formés, extraits des eaux cosmiques primordiales. À ce titre il est aussi le point d’appui, la base sur laquelle repose le cosmos, ou la terre, qu’il soutient et entoure de ses anneaux innombrables. Inversement, quand un cycle cosmique se termine, l’univers n’est pas à proprement parler anéanti, mais il subit une sorte de résorption (pratisamcara) ou de dissolution dans le liquide informe antérieur à toute origine : le serpent demeure lui aussi, portant sur ses anneaux le dieu Vishnu plongé dans un sommeil yogique. Du nombril de Vishnu endormi surgit un lotus et, de ce lotus, apparaît Brahmâ le dieu créateur, qui va donc procéder à la re-création du monde.

 
brahma, vishnu and shiva seated on lotuses with their consorts, ca1770

Bref c’est compliqué !

Ce qu’il faut en retenir ? L’œuf d’or et l’importance du corps humain dans la composition du monde. Revenons un instant sur l’œuf d’or ou l’embryon. C’est un thème qui revient par exemple en yoga nidra où l’on va se réfugier dans cet œuf pour se ressourcer / se purifier / se protéger / revenir à l’état initial / trouver son Soi.

Quant à la relation corps – création du monde, elle relève de l’idée que la création du monde s’est édifiée sur une corps humain qui se détruisait, ce qui est une des explications au sacrifice humain pratiqué.

On observera aussi la présence de tapas et agni, l’ardeur et le feu qui sont à l’origine de l’origine ! N’avons nous pas comme kryia : Nauli, Agni Sara ? ou comme pranayama : Kappalabatthi et Bastrika ? Ces kryia et pranayama sont réalisés avec ardeur et réveillent le feu en nous afin de réveiller et faire s’élever l’Energie, la Shakti/Kundalini !

 
 

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